Pleins feux sur le créateur : Philippe Xavier

Pleins feux sur le créateur : Philippe Xavier

Ceci est la traduction d'un interview initialement fait en anglais par Europe Comics.

Né en France, Philippe Xavier est un véritable globe-trotteur. À 18 ans, il part étudier la publicité en Argentine, puis il devient graphiste au Chili pendant un temps. À 22 ans, il s’installe aux Etats-Unis et y vit pendant 12 ans tout en se lançant dans l’industrie de la BD. Il commence à illustrer des BD pour divers éditeurs, ainsi qu’à collaborer avec différents magazines. Suite à son expérience aux États-Unis, il publie Le souffle et Paradis perdu chez les Edition Soleil. En 2006, Philippe s’associe avec Jean Dufaux et l’éditeur Le Lombard, et déménage à Bruxelles, où les deux créateurs firent équipe pour la série au long cours intitulée Croisade (Crusade, cinebook). Depuis 2017, Philippe travaille aux côtés de Matz sur les aventures à succès de Tango. Le quatrième tome vient de sortir dans les librairies françaises et la traduction anglaise fait son chemin vers le catalogue de BD européen ! Pendant que nous attendons avec impatience, nous avons retrouvé Philippe durant le Festival de la Bande Dessinée d’Angoulême de cette année pour en savoir plus sur sa carrière, ses voyages et l’univers dément de Tango !

Comment avez-vous débuté dans le monde de la BD ?

Au début des années 90, j’ai déménagé aux États-Unis, et en 1995 à la Dragon Con d’Atlanta j’ai rencontré un éditeur de Caliber Comics, Joe Pruett, qui m’a donné ma chance pour une nouvelle serie – Legendlore. Ma première histoire est sortie en 1996 pour le tome 22 de Negative Burn. La couverture était un dessin de Moëbius alors c’était très excitant vous savez, j’étais là : « Ouah, c’est trop bien », étant donné que j’ai grandi en lisant Blueberry de Moëbius. Et après ça, j’ai juste continué à travailler dans le monde du Comics pendant environ 6 ans. J’ai fait 55 Comics. Ce n’était pas les super-héros les plus populaires, je travaillais plutôt pour des éditeurs indépendants comme Caliber, Peregrine ent., Heavy Metal Magazine, Frank Frazetta Fantasy Illustrated. C’était beaucoup de fantastique, très tolkien. Très différent de ce que je fais aujourd’hui.

À quel moment exactement avez-vous réalisé que vous vouliez faire de la BD ?

Toute ma vie. Depuis que j’ai 14 ans environ. J’ai toujours voulu dessiner des BD dans le style européen, franco-belge. Mais ma vie m’a beaucoup fait bouger. J’ai déménagé en Amérique du Sud quand j’avais 18 ans, j’ai vécu à Buenos Aires, au Chili et puis je me suis installé aux États-Unis. Une fois là-bas, j’ai voulu continuer à dessiner. J’ai travaillé dans la publicité donc je faisais beaucoup de storyboard et des choses semblables. Puis un jour, j’ai pris un Comics de Jim Lee, c’état X-men, Omega Red et c’est là que j’ai réalisé : « Ouah, c’est ça que je dois faire. ». Et comme j’étais aux États-Unis, j’ai commencé par les Comics américains. Si j’avais été en France, j’aurais fait des bandes dessinées franco-belge. Et puis, en 2002, les Éditions Soleil ont vu mon travail. Ils m’ont contacté et j’ai fait un livre pour eux alors que j’étais toujours aux États-Unis. Et puis je suis rentré en France et j’y suis resté pour y travailler. Et nous voilà.

Comment l’idée de Tango a-t-elle vu le jour? Est-ce que les voyages vous ont inspirés Tango ou bien est-ce Tango qui vous a inspiré à faire plus de voyages ?

Le voyage fait partie de moi. J’adore voyager et j’aime les aventures tranquilles. Comme vous le savez, les aventures de Tango sont un peu plus extrêmes ; les miennes ne sont pas comme ça ! Du coup, tous les pays que vous voyez dans les différents tomes de Tango, j’y ai vécu, j’y suis passé ou j’y suis resté pendant quelques mois. J’ai de très chouettes souvenirs de mes voyages et des gens que j’ai rencontrés. C’est donc ce que je voulais faire : tout mettre dans une histoire d’aventure, ajouter de l’action et des personnes sexy, et voilà.

Pour le moment, il y a 4 tomes dans la série, chacun prenant place dans un endroit différent. Y en a-t-il un qui vous tienne plus à cœur ? Un qui vous rappelle les souvenirs les plus amusants ?

C’est définitivement le premier, celui se passant en Bolivie. Premièrement, parce que la Bolivie est un pays incroyable ! Matz (le scénariste de Tango), que je ne connaissais pas très bien à l’époque, et moi avons eu la chance de nous y rendre pour découvrir le pays, et ce fut extraordinaire ! Nous avons écrit tous les jours durant notre voyage. Nous visitions différents endroits et nous nous disions : « Ah, c’est génial, faisons une scène ici. » Donc, tous les lieux que vous voyez dans le tome un sont plus ou moins réels.

Votre carnet de voyage à la fin du livre fournit un contexte vraiment fascinant à l’ensemble !

C’est vrai, et je vois comment les personnes se sont vraiment liées au tome grâce à ça. Je suis très heureux à chaque fois que je rencontre des fans qui sont allés en Bolivie et qui reconnaissent les lieux dans le tome.

En parlant de Matz, Tango et son compagnon Mario ont une amitié virile très amusante qui se développe tout au long de la série. Je me demande si certaines de vos dynamiques avec Matz se sont retranscrites dans ces personnages?

Toutes !

À l’exception des choses illégales !

Oh bien, bien sûr. (rires)

Alors, qui est Tango et qui est Mario ?

Alors, d’un point de vue physique, je dirais que je me rapproche le plus de Tango et Matz de Mario. La manière avec laquelle nous profitons de notre vie, les choses comiques que nous nous disons, tout est pareil. Mais des fois nous échangeons, je ne sais pas pourquoi, cela fonctionne juste comme ça. Mais basiquement, oui, je suis Tango et Matz est Mario. Des fois il est vraiment très énervé, car il dit que j’ai toutes les filles ! Et je suis là : « Allez, dans le tome deux tu as toutes les filles ! »

La série est très cinématographique. Y a-t-il des films en particulier qui vous ont inspirés pendant la création de la série ?

Ce que nous voulions faire avec Tango c’était de recréer les BD que nous avions l’habitude de lire quand nous étions jeunes, comme Bernard Prince, Bruno Brazil, Xiii, mais nous voulions aussi recréer le même genre de tandem que ces deux gars avec des répliques droles semblables à celles dans les films tels que Lethal weapon, The last boy scout, le genre de films que nous allions voir à cette époque, et c’était juste drole. Ce n’était pas compliqué de les comprendre, c’était une bonne balade ! Midnight Run avec Robert De Niro est le film parfait pour moi ; Tango serait parfait pour ça. C’est donc ce genre de choses que nous faisons. C’est un peu qui je suis, j’aime m’amuser, j’aime taquiner les gens et qu’ils me rendent la pareille de façon amicale, je veux voyager, voir de belles choses, et j’aime l’action, j’y ai donc mis tout mon cœur avec tous les livres que j’ai lus et tous les films que j’ai appréciés. Je veux aussi que les gens qui achètent les livres reconnaissent ce qu’ils ont lu au fil des ans, je veux qu’ils se sentent à l’aise, et cela fonctionne. Tango est très classique, mais dans un genre nouveau.

Pour le moment, nous avons 3 tomes en anglais, avec le quatrième étant en cours de traduction. Pouvez-vous nous donner un petit avant-goût d’où Tango va se retrouver cette fois-ci ? Dans que genre de pétrin il va se retrouver ?

Après le tome trois ils ont quitté Paname, et si vous prenez la route panaméricaine, vous vous retrouverez au bout de Paname, où pour traverser la frontière vous devez passer par la région du Darién. C’est l’endroit le plus dangereux au monde. Tango et Mario traversent cette région et atterrissent en Colombie. Une fois là-bas, ils vont à Quito pour se détendre un peu. Et là, tout ce qui s’est passé dans le tome trois les rattrappent. Nous ramenons aussi Carmen du tome un, et le cartel de Miami. Et tout ces gens vont se rapprocher petit à petit de Tango et Mario. Et toutes ces choses que nous avons semés dans les tomes un, deux et trois se retrouvent dans le tome quatre. Tout est révélé : nous découvrons d’où vient Tango, pourquoi il a travaillé pour la DEA, pourquoi il a volé l’argent, toutes les choses qu’il a faites avec Carmen… Les choses se concluent très joliment. Voilà le tome quatre. Et je travaille actuellement sur le tome cinq.

Combien de tomes avez-vous prévus ?

Nous ne le savons pas encore… Les quatre premiers tomes sont sur Tango, son passé et ses problèmes. Le cinquième tome est sur Mario et ses probèmes, alors il sera très différent des précédents. Mario qui a environ 60 ans aujourd’hui, était flic en Argentine au début des années 80. Et au début des années 80, l’Argentine et le Chili étaient sous une dictature, alors des milliers de personnes sont mortes aux mains du régime militaire d'extrême droite. À l’époque, Mario a mis en prison un homme très dangereux et cet homme sort après 40 ans de prison. C’est un vieil homme dans une chaise roulante, il est très mauvais, vraiment très malveillant, et il veut torturer Mario et lui faire avouer qui l’a vendu. Et donc, Tango a 54 pages pour trouver Mario et le ramener en un seul morceau.