I.R.$ - interview exclusive de Stephen Desberg

I.R.$ - interview exclusive de Stephen Desberg

Si ce diptyque reste dans la veine polar qui a fait la renommée de la série, il est aussi l'occasion pour Stephen Desberg de tenter de nouvelles expériences scénaristiques, notamment à travers une voix off troublante. Bernard Vrancken propose, lui, un découpage plus nerveux et un dessin réaliste toujours aussi évocateur. En réinventant leur héros aux cheveux blancs, les deux auteurs offrent l'occasion idéale de se replonger dans la saga-phare de la collection Troisième vague.

Découvrez donc dès aujourd'hui l'interview exclusive de Stephen Desberg, scénariste de la série I.R.$. Déjà un grand lecteur ou une grande lectrice de la série ? N'oubliez pas que le tome 21 sortira le 26 juin !

« LARRY DEVAIT S'IMPLIQUER DE MANIÈRE DIRECTE »

Pourquoi avoir décidé de vieillir votre héros ?

C'est une évolution naturelle de la série, que nous sentions venir depuis plusieurs albums. Il fallait que le personnage évolue, qu'il y ait un effet miroir entre les sujets sur lesquels il enquête et sa vie personnelle. Même si Larry peut parfois paraître un peu froid dans sa détermination, c'est quelqu'un de très impliqué. Pour lui, lutter contre les dérives de la finance n'est pas simplement un travail. Depuis le début, il a une position très tranchée par rapport aux grands enjeux financiers et la corruption. Sans être un militant de gauche, il lutte avec ses moyens d’inspecteur fiscal afin de redresser certains torts. Il se trouve que Larry s'est rendu compte petit à petit que l'I.R.$ limitait ses possibilités de s'attaquer à certains dossiers. Dans les deux précédents diptyques, pour pallier à cela, il avait pu enquêter sous couverture, à tel point que l'on ne savait plus vraiment s'il travaillait encore pour le fisc américain. Mais cela n'a pas suffi, il devait passer à la vitesse supérieure, en s'impliquant de manière directe. La rupture était, en quelque sorte, inévitable.

Et c'est donc vers la politique qu'il se tourne…

Que les choses soient claires : I.R.$ n'a pas vocation à devenir une série politique. Mais je trouvais intéressant d'impliquer Larry directement en politique. À partir de ce nouveau diptyque, il devient sénateur et a évidemment un intérêt particulier pour toutes les questions qui touchent à la finance. Ce bond en avant ne sort pas de nulle part et nous expliquons bien sûr ce qu'il s'est passé entre les tomes 20 et 21. En revanche, ce récit est politisé au sens de la vie politique américaine, c'est-à-dire les scandales, les modes de financement des partis, les arrangements… On ne cherchera pas à savoir si Larry est un sénateur de droite ou de gauche, car c'est lui-même qui est remis en question, pas ses convictions personnelles ou les dossiers sur lesquels il travaille.

Larry Max change de métier, mais également de vie…

Oui, il n'est plus tout seul en première ligne à risquer sa vie. Sa femme et ses enfants sont ainsi mis en danger dès les premières planches de La Chute des anges. Cela implique pour Larry de nouvelles responsabilités. Sa réputation est bien sûr en jeu, mais aussi sa famille. Il faut également noter que son ancienne carrière le poursuit dans sa nouvelle existence. On lui reproche notamment le peu de scrupules ou de sens moral qu'il a parfois eu lorsqu'il s'agissait d'obtenir des résultats. La fin justifie les moyens, certes, mais ses comportements excessifs reviennent le hanter.

Ces changements dans la destinée du protagoniste d'I.R.$ répondaient-ils aussi à des besoins en termes d'écriture ?

Je pense qu'au bout de vingt albums, on ne peut que se demander si l'on a fait le tour du sujet et des personnages. Avant même de penser aux lecteurs - qui sont évidemment importants, là n'est pas la question -, il s'agissait de savoir comment Bernard et moi pouvions toujours trouver notre plaisir avec la série. Car, au final, le lecteur est sensible au travail fait avec honnêteté et passion. Depuis quelques années, j'avais envie de trouver une forme d'équilibre entre ce que j'avais fait avant et ce pour quoi je suis aujourd'hui connu en bande dessinée, à savoir le thriller. Je crois que je suis désormais sur la bonne voie et je trouve intéressant de constater qu'il existe une certaine harmonie entre mon évolution en tant que scénariste et celle du Lombard en tant que maison d'édition.