"Capricorne en intégrale : un signe qui ne trompe pas", l'article d'Actualitté

"Capricorne en intégrale : un signe qui ne trompe pas",  l'article d'Actualitté

La série Capricorne, dessinée et scénarisée par Andreas depuis la fin du millénaire dernier, connaît une longévité exceptionnelle. Portée à ses débuts par une prépublication dans les pages du Journal de Tintin et le succès de la série Rork qui l'a précédée, cette vingtaine d'aventures du plus étrange astrologue de la bande dessinée forme, en toute discrétion, une œuvre d'une cohérence impressionnante. La publication d'une intégrale en 4 volumes, dont les deux premiers sont déjà disponibles, par les éditons du Lombard permet d'en prendre conscience.

Tout commence à New York, dans une époque rétrofuturiste assez proche (similaire aux années 30, précisera Andreas) dans un monde qui emprunte bien des caractéristiques au nôtre, mais semble traversé par des phénomènes qui tiennent tantôt du paranormal, tantôt du fantastique. La mégapole ressemble à celle que nous connaissons, mais ses égouts, par exemple, sont reliés à un réseau de tunnels creusés par les nations indiennes, bien avant l'arrivée des premiers colons européens.

La technologie n'est pas beaucoup plus évoluée que la nôtre, mais elle est différente : on y croise des zeppelins, des biplans, des armes à feu qui semblent remonter au début du siècle, des mines de sabotage qu'on peut glisser à l'intérieur d'un corps humain et qui peuvent déployer des pointes acérées ou exploser… En clair, le décalage, léger, force le lecteur à rester sans cesse sur ses gardes. Rien dans Capricorne ne va de soi.

Au moins trois héros pour une série

Déjà, le héros sait qu'il ne s'appelle pas vraiment Capricorne. Son passé est trouble et flou, ses origines également. Il fait équipe avec Astor, un petit bibliothécaire à grandes lunettes et à long nez, et Ash Grey, aventurière et pilote d'avion, bientôt propriétaire d'une flotte d'engins volants. Ils vivent dans un gratte-ciel dont Capricorne est devenu propriétaire un peu par accident.

Mais ces héros ne seraient pas complets s'ils n'étaient flanqués, dans l'ombre, d'une série de doubles maléfiques, des ennemis, mais pas que : Rork, qui a fait l'objet d'une autre série du même auteur (et qui vit dans un univers parallèle à celui-ci), Mordor Goth dont le nom à lui seul évoque le mal en littérature, Zarkan et tous les adeptes du Concept.

L'intuition comme ligne de force

Alors que de nos jours en BD, en roman? comme dans les séries télés, les fictions reposent sur des pivots et des ressorts dramaturgiques savamment orchestrés, Andreas a conçu une œuvre dont la logique se fie plus à l'intuition et au ressenti qu'à la pure rationalité. Dès les premiers albums il pressent ce qui sera révélé ensuite dans ses histoires. Quand ? Il n'en sait encore rien…

Mais ce qui surgit incidemment dans le dessin, un tatouage, un tension électrique, un logo, un pointe acérée, peut devenir quelques albums plus tard un motif narratif central. Ainsi, en va-t-il par exemple des cartes divinatoires qui apparaissent avec régularité d'une histoire à l'autre, sans jamais porter le même sens et jouer le même rôle

Un cadreur hors pair, un monteur minutieux

Andreas est passé maître dans le découpage de planches alambiqué et le cadrage hors norme. Raconter une histoire en bande dessinée ne se résume pas à ses yeux à enchaîner les vignettes. D'un album à l'autre, de planche en planche, les dessins se font écho. Les symétries, enchâssements, zooms, répétitions et autres figures de style graphiques s'enchaînent et forcent le lecteur à défricher son sentier de lecture dans des images à première vue parfois touffues, mais qui s'éclaircissent au deuxième puis au troisième passage. C'est aussi l'un des plaisirs de la relecture en intégrale.

Et que dire des doubles planches vertigineuses, des perspectives dantesques et des images où l'humain semble réduit à la taille d'une fourmi ? Qu'ils collent à merveille au deuxième cycle des aventures de Capricorne, où l'avènement d'un pouvoir totalitaire fait enfermer tous ceux qui croient à une forme ou l'autre de sciences occultes, pour ne laisser la place qu'à un matérialisme uniforme, défendu par les armes et la police secrète, imposé à une population qui ne semble pas vraiment cultiver le goût de la révolte, plutôt la passion, immodérée, pour la soumission et les discours populistes…


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